Il y a les dettes financières (de type emprunts traditionnels), il y a les ventes d'actions ou de parts sociales et il y a les dettes convertibles. Voyons pourquoi cette troisième solution peut être adéquate pour les startups.
Une dette convertible n'est autre qu'un emprunt traditionnel pouvant se transformer en une cession d'une partie du capital lors d'un événement financier futur.
De prime abord, cela peut paraître dur pour l'entrepreneur car cela implique un remboursement de prêt, des intérêts qui s'accumulent et, si les choses vont bien, une perte de contrôle dûe à la cession d'une partie des actions.
En vérité, les entrepreneurs devraient apprécier les dettes convertibles car les investisseurs les adorent. C'est un excellent moyen de sécuriser l'investissement sans définir une valeur de la société naissante et sans revenus. Cela les protège d'une forte diluation lors du prochain tour de table.
Etudions l'exemple suivant. Vous créez une entreprise, ForteCroissance Inc. (FCI), et vous êtes convaincu que le meilleur moyen pour développer votre business est d'attirer de gros capitaux propres venant d'investisseurs institutionnels (venture capital). Vous savez qu'attirer ce type d'investisseurs ne se fera pas rapidement, mais vous avez besoin d'argent immédiatement pour faire décoller FCI et attirer vos premiers clients.
Vous vous tournez alors vers vos amis, vos connaissances, votre famille, bref, des business angels de votre réseau de connaissance. Qu'allez-vous leur proposer ? Un simple emprunt, des parts du capital ou un emprunt convertible.
Pour la plupars des business qui n'ont pas besoin de venture capital pour atteindre le seuil de rentabilité, un emprunt traditionnel est souvent la meilleure solution et la meilleure stratégie.
Toutefois, si vous êtes certain que FCI a besoin de venture capital, contracter une dette convertible est certainement la meilleure solution. Premièrement car cela vous évite de déterminer la valorisation de la société avant l'arrivée d'un investisseur institutionnel. Déterminer la valeur d'une startup est très subjectif, et l'entrepreneur qui lève de l'argent auprès de ses proches la sur-évalue généralement. Une dette convertible élimine ce risque de "down round" (un tour de table avec une valorisation d'action inférieure au précédent).
Dans le cas de FCI, si vous pensez financer par les capitaux propres, vous pouvez définir une valorisation de 2,5 M€ avant financement. Si vous levez 500 K€ auprès de vos proches, vous aurez une valorisation "post money" de 3 M€. Si vous recevez une offre de la part d'un investisseur institutionnel pour 2 M€, vous devrez convaincre vos proches que de ce nouvel investissement et ils seront déçus d'apprendre que ce nouvel entrant obtient un "rabais" de plus de 30% sur l'action.
Mais, si vous utilisez une dette convertible pour lever les 500 K€ initiaux, c'est une bien meilleure affaire pour eux. Leur risque est moindre car si vous mettez plus de temps que prévu pour réaliser le second tour de table, leur dette accumule des intérêts, et quand le nouvel investisseur arrivera, leur investissement initial souffrira beaucoup moins de la dilution.
En plus, une dette convertible inclue souvent une clause qui octroie un bonus lors de la conversion en capital. En d'autres termes, vos proches pourront obtenir un rabais sur le prix des actions négocié par les investisseurs institutionnels. Le montant du rabais est négociable mais il est généralement de 20 à 25% par an. Donc si vous mettez 6 mois à réaliser votre second tour de table, vos proches pourront prétendre à un rabais pouvant aller jusqu'à 12,5%.
Si les dettes convertibles sont si intéressantes, pourquoi ne sont-elles pas plus utilisées ?
Une des premières raisons est qu'elles nécessitent un bon conseiller juridique pour rédiger les conditions et cela peut représenter une dépense importante dans une phase de lancement. Peut-être une raison plus forte encore est que les entrepreneurs sont intimidés à l'idée d'accumuler une dette de 500 K€ dès la phase de lancement.
Il y a trois décisions fondamentales à prendre lors de l'utilisation de dettes convertibles :
1. Quel sera l'événement qui déclenchera la conversion ? Vous pouvez choisir de spécifier un événement (ou une série d'événements) comme un seuil de chiffre d'affaires, un seuil de financement ou autres. Généralement, les entrepreneurs et les investisseurs sont d'accord pour que la conversion se déclenche lors d'un nouveau tour de table financier.
2. Y aura-t-il un rabais lors de la conversion ? C'est une décision difficile mais si vous ne proposez pas de rabais, ou qu'il est trop faible, il vous serait difficile de convaincre les premiers investisseurs. Et si le rabais est trop important (ou si le second tour de table prend trop de temps), c'est vous, entrepreneur, qui payerez sur vos propres parts !
3. Que va devenir l'investissement si le déclencheur de la conversion n'intervient pas ? Si la dette est convertie lors d'une prochaine levée de 10 M€ mais qu'elle ne se réalise jamais ? La dette reste une dette. Vous pouvez toutefois définir que la dette puisse se convertir à la discrétion des investisseurs ou de la société.
En conclusion, ce mécanisme vous permet de dire à vos proches "J'ai besoin d'argent et vous en avez. Comme je ne sais pas combien m'a société va valoir dans ces prochains mois, laissons les investisseurs professionnels fixer sa valeur lors du prochain tour de table. En attendant, je vous emprunte l'argent, votre risque est faible (vos revenus aussi) mais vous aurez un réel bonus et votre prêt se transformera en réel investissement."
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